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Que sert à l'homme de gagner l'univers s'il perd son âme

16 janvier 2014 4 16 /01 /janvier /2014 09:41

Le plus difficile de tous les arts, est incomparablement, l'art de vivre, et c'est pour celui-là que tout homme se croit doué. Beaucoup sont doués d'autre façon, éminents si l'on veut, et ne sont ici que puérilité et  misère : grands  mathémati­ciens qui ne savent   pas   tenir   leurs   comptes ; grands artistes qui bousillent leurs jours; philo­sophes « amis de la sagesse » qui ne savent où se tient, ni comment s'acquiert ou se pratique la sagesse.

 

On croirait que le premier souci du vivant va être de s'orienter dans le milieu où se déploie sa vie, comme fait tout voyageur devant le pays que lui figure sa carte. C'est le premier mot que nous a dit Pascal. Or, Pascal l'a observé, c'est que personne ne le fait, parmi les soi-disant vivants qui composent le « monde ».

 

On va devant soi, et l'on s'attache au premier objet, à la première entreprise attrayante ou « qui semble utile ». Bien peu songent à se demander : utile à quoi? Bien peu totalisent. Ceux qui le pré­tendent et parlent de  « réussir sa vie » n'en demeurent pas moins dans le partiel et dans l'incohérent, faute d'avoir rattaché le plan d'existence qu'ils envisagent à ses antécédents spirituels et à son terme.   « Réussir sa vie », qu'est-ce que cela signifie, pour qui ignore ou néglige sa fin, et quel sens décisif peut-on attribuer au mot « réussir », si l'on ne sait les motifs tout premiers de l'action?

 

Saint Thomas d'Aquin refuse d'appeler nos succès du temps les fruits proprement dits de l'activité humaine. Ce ne sont pas plus des fruits, dit-il, que la position d'un mobile, au milieu de sa course, n'est un repos. Le mobile va plus loin : donc il n'est pas au terme; dès lors, comment aurait-il l'effet de son mouvement? Ainsi n'avons-nous point nos fruits, tant que pousse la plante humaine destinée à s'épanouir dans le ciel.

 

Mais cela suppose qu'on est fixé sur la desti­née. Beaucoup ne le sont pas, et à ceux-là on ne peut que souhaiter bonne chance dans leur recher­che, ou, s'ils ne cherchent point, une heureuse occasion d'inquiétude, un choc bienfaisant. Ce qui est plus surprenant, c'est l'état de tant de chrétiens qui, à aucun prix, ne voudraient renon­cer à ce titre, se mêlent avec ar­deur à ceux qui pourtant n'ont d'autres principes, d'autres maximes ou d'autres usages  païens, quant à l'art de vivre.

 

Le catholicisme est ennemi du monde et celui-ci ennemi du catholicisme; mais le plus étrange de tout est un catholicisme redevenu mondain, imbu de l'esprit mondain, ne respirant que jouissance, succès, amusements temporels, ou pire, dans un oubli total de l'esprit du catholicisme.

 

Ni homme, ni Dieu, ni homme Dieu, mais comme Satan Dieu : tel est le type idéal d'un pa­reil groupe. A chacun de voir s'il ne tiendrait pas de lui ou si même, sans ambages, il n'en serait point.

 

Extrait de : RECUEILLEMENT. Œuvre de A. D. Sertillages O.P. (1935)

 

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