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Que sert à l'homme de gagner l'univers s'il perd son âme

1 avril 2017 6 01 /04 /avril /2017 08:30

   LE  TRAVAIL

De nos jours, bien peu de gens exercent une pro­fession qui soit de leur goût. Au lieu de choisir un métier par vocation, ils sont contraints par les néces­sités économiques d'accomplir des besognes qui leur donnent peu de satisfactions. Beaucoup d'entre eux estiment qu'ils devraient avoir des fonctions plus importantes. D'autres disent : « Mon emploi n'a d'in­térêt que parce qu'il me permet de gagner ma vie. » Cette manière de voir explique la fréquence du travail inachevé ou mal fait. Seul l'homme qui choisit un métier dont les fins ont son approbation se grandit en travaillant. Seul il a le droit de dire, lorsque la besogne est achevée : « Voilà qui est bien fait ! »

A notre époque le sens de la vocation fait cruelle­ment défaut. La faute n'en incombe pas seulement à la complexité de notre système économique, mais surtout à l'effondrement de nos valeurs spirituelles. N'importe quel travail, pourvu qu'on le situe dans sa véritable perspective, peut contribuer à nous ennoblir. Mais avant d'accéder à cette évidence, il convient de comprendre la philosophie du travail.

Toute tâche a deux aspects : l'idée que nous nous en faisons, et le travail en soi, considéré indépendam­ment des buts que nous poursuivons. Nous jouons au tennis pour prendre de l'exercice, mais nous nous efforçons de jouer ce jeu aussi bien que possible, sim­plement pour le plaisir de réussir. L'homme qui prétendrait prendre tout autant d'exercice en adoptant sur le court une technique extravagante, méconnaîtrait le second aspect de toute activité : l'accomplissement d'une tâche en se confor­mant à ses propres normes d'excellence. De même, un homme qui travaille dans une usine d'automobiles peut avoir son salaire comme but principal ; mais le but du travail est la perfection d’en son exé­cution. L'ouvrier doit en être perpétuellement cons­cient, comme l'artiste est conscient d'être à la recherche de la beauté dans son œuvre, la ménagère à la recherche de la propreté lorsqu'elle essuie la poussière.

Aujourd'hui, le premier aspect du travail est devenu primordial et nous avons tendance à ignorer le second, de sorte que beaucoup d'ouvriers vivent une vie diminuée pendant leurs heures de travail. Ils sont comme des jardiniers auxquels on aurait ordonné de faire pousser des choux pour fabriquer de la choucroute et qui ne se préoccuperaient pas de savoir si leurs carrés sont envahis par les mauvaises herbes, si leurs choux sont ou non des légumes sains. C'est là une attitude erronée. Dieu lui-même a tra­vaillé lorsqu'il a créé le monde, et ensuite, en contem­plant son œuvre, il a estimé «qu' elle était bonne ». La fierté légitime que l'on éprouve en faisant du bon travail nous paie d'une grande partie de nos peines. Certaines gens qui ont conservé cette mentalité artisanale trouvent du plaisir à accomplir n'importe quelle sorte de besogne. Qu'il s'agisse de reparer une chaise, de nettoyer une écurie ou de sculpter une statue pour une cathédrale, ils connaissent la satisfaction du « travail bien fait ».

Leur honneur et leur dignité sont rehaussés par les disciplines du travail exécuté avec soin. Ils ont sauvegardé le vieil état d'esprit du Moyen Age, époque où le travail était un événement sacré, une cérémonie, une source de mérite spirituel.

Le travail, on ne l'entreprenait pas alors par souci de gain matériel, on y était poussé par une sorte d'élan intérieur, par le désir de projeter la puissance créatrice de Dieu dans nos propres efforts humains.

Aucune tâche ne doit être entreprise sans qu'on se soit bien pénétré de ces deux aspects essentiels du travail. Pour lier les deux choses — la joie, par exemple, de fabriquer une table et la nécessité de la fabriquer pour gagner sa vie — il convient d'avoir présents à l'esprit les principes suivants :

Le travail est un devoir moral et non, comme beaucoup de gens l'imaginent, une simple nécessité physique. Saint Paul a dit : « Celui qui refuse de tra­vailler, il faut le laisser mourir de faim. » A partir du moment où l'on considère le travail comme un devoir moral, il devient clair qu'il ne contribue pas seulement au bien social, mais qu'il rend également d'autres services au travailleur : il le préserve de l'oisiveté d'où tant de maux peuvent découler, et il maintient le corps en état de soumission à une volonté raisonnée.

Travailler, c'est prier. Une vie bien réglée ne limite pas la prière aux seules heures de loisir : elle transforme le travail lui-même en prière. C'est ce qui se passe lorsque nous nous tournons vers Dieu au commencement et à la fin de chacune de nos tâches et que nous lui offrons notre travail par amour pour lui. Alors, qu'il s'agisse de soigner un enfant ou de fabriquer des carburateurs, d'actionner un tour ou de faire marcher un ascenseur, notre besogne est sanc­tifiée. Il n'y a pas de dévotion pendant les heures de loisir qui puisse compenser les négligences des heures de travail. En revanche, n'importe quelle besogne honnête peut être transformée en prière.

Un économiste médiéval, Antonio de Florence, a résumé dans une formule heureuse les rapports du travail et de la vie : « L'objet que nous poursuivons en gagnant de l'argent est de subvenir à nos besoins et aux besoins de ceux qui dépendent de nous. En subve­nant à nos besoins et à ceux des autres, nous avons pour objet de vivre vertueusement. En vivant vertueusement, nous avons pour objet de sauver nos âmes et d'accéder au bonheur éternel. »

En bonne justice, le travail devrait recevoir deux sortes de rétribution, car ce n'est pas seulement un phénomène individuel, c'est un phénomène social. John Jones qui travaille dans une mine est fatigué à la fin de la journée : c'est là son sacrifice individuel. C'est pour cela qu'il reçoit son salaire. Mais au cours de sa journée de travail, John Jones a également contribué socialement au bien-être économique de son pays et du monde…

Extrait de : LE CHEMIN DU BONHEUR  (Mgr fulton J. sheen) (1957)

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