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Que sert à l'homme de gagner l'univers s'il perd son âme

26 juillet 2015 7 26 /07 /juillet /2015 08:17

DEUXIÈME PARTIE

LA CROIX : CODE DE PERFECTION CHRÉTIENNE

Les quatre règles de la per­fection chrétienne:

Méditons bien ces admirables paroles de notre aimable Maître, qui renferment toute la perfection de la vie chrétienne.

Toute la perfection chrétienne, en effet, consiste:

1° à vouloir devenir un saint : Si quelqu'un veut venir après moi;

2° à s'abstenir: qu'il renonce à soi-même;

3° à souffrir: qu'il porte, sa croix;

4° à agir: et qu'il me suive.

A. — Vouloir se conformer à J.-C. crucifié.

Si quelqu'un, quelqu'un et non pas quelques-uns, pour marquer le petit nombre des élus qui veulent se conformer à Jésus-Christ crucifié en portant leur Croix. Il est si petit, si petit, que, si nous le connaissions, nous nous en pâme­rions de douleur. Il est si petit que si Dieu voulait les assembler, il leur crie­rait, comme il fit autrefois par la bouche d'un prophète : Assemblez-vous un à un, un de cette province, un de ce royaume. (Le Saint ne parle ici que des chrétiens qui suivent plus parfaitement Jésus-Christ en por­tant toujours leurs croix avec courage; il n'a pas l'intention de mettre au rang des réprouvés les chrétiens moins parfaits, dont le nombre est bien grand.)

Le vouloir d'une volonté vraie, courageuse.

Si quelqu'un a une vraie volonté, une volonté entière, déterminée non par la nature, la coutume, l'amour-propre, l'intérêt ou le respect humain, mais par une grâce toute victorieuse du Saint-Esprit, qui ne se donne pas à tout le monde: La connaissance du mystère de la Croix dans la pratique n'est donnée qu'à peu de gens ; il faut qu'un homme, pour monter sur le Calvaire et s'y laisser mettre en Croix avec Jésus, au milieu de son propre pays, soit un courageux, un héros, un déterminé, un homme élevé en Dieu, qui fasse litière du monde et de l'enfer, de son corps et de sa propre vo­lonté, un déterminé à tout quitter, à tout entreprendre et tout souffrir pour Jésus-Christ. Sachez, chers Amis de la Croix, que ceux parmi vous qui n'ont pas cette détermination ne marchent que d'un pied, ne volent que d'une aile, et ne sont pas dignes d'être parmi vous, parce qu'ils ne sont pas dignes d'être nommés Amis de la Croix qu'il faut aimer avec Jésus-Christ : Il ne faut qu'une demi-volonté de cette ma­nière pour gâter tout le troupeau, comme une brebis galeuse. S'il y en a déjà quel­qu'une d'entrée par la mauvaise porte du monde dans votre bergerie, au nom de Jésus-Christ crucifié, qu'on la chasse comme une louve entrée parmi les brebis.

Exemple de Jésus-Christ.

Si quel­qu'un veut venir après moi, qui me suis si humilié et si anéanti, que je suis deve­nu plutôt un vermisseau qu'un homme ; après moi qui ne suis venu au monde que pour em­brasser la Croix ; que pour la placer dans le milieu de mon cœur, que pour l'aimer, dès ma jeunesse, que pour soupirer après elle pen­dant ma vie, que pour la porter avec joie en la préférant à toutes les joies et les délices du ciel et de la terre, et enfin qui n'ai été content que lorsque je suis mort dans ses divins embrassements.

B. — Renoncer à soi-même.

Si quelqu'un donc veut venir après moi ainsi anéanti et crucifié, qu'il ne se glorifie comme moi que dans la pauvreté, les humiliations et les douleurs de ma Croix, qu'il renonce à soi-même.

Loin de la compagnie des Amis de la Croix, ces souffrants orgueil­leux, ces sages du siècle, ces grands gé­nies et ces esprits forts qui sont entêtés et bouffis de leurs lumières et de leurs talents ; loin d'ici ces grands babillards, qui font grand bruit et point d'autre fruit que celui de la vanité; loin d'ici ces dévots orgueilleux qui portent partout le quant à moi de l'orgueilleux Lucifer, qui ne peuvent souf­frir qu'on les blâme sans s'excuser, qu'on les attaque sans se défendre, et qu'on les abaisse sans se relever ! Prenez bien gar­de d'admettre en votre compagnie de ces délicats et sensuels qui craignent la moin­dre piqûre, et qui s'écrient et se plai­gnent à la moindre douleur, qui n'ont ja­mais goûté de la haire, du cilice et de la discipline, et des autres instruments de pénitence, et qui, parmi leurs dévotions à la mode, mêlent une délicatesse et une immortification la plus plâtrée et la plus raffinée.

C. — Porter sa croix.

Sa croix.

Qu'il porte sa Croix..., la sienne. Que celui-là, que cet homme, que cette femme rare, que toute la terre d'un bout à l'autre ne saurait payer, prenne avec joie, embrasse avec ardeur, et porte sur ses épaules avec courage sa Croix, et non celle d'un autre; sa Croix, que par ma sagesse je lui ai faite avec nombre, poids et mesure ; sa Croix, à laquelle j'ai de ma propre main mis ses quatre dimensions dans une grande jus­tesse, savoir: son épaisseur, sa longueur, sa largeur et sa profondeur; sa Croix, que je lui ai taillée d'une partie de celle que j'ai portée sur le Calvaire, par un effet de la bonté infinie que je lui porte; sa Croix, qui est le plus grand présent que je puisse faire à mes élus sur la terre; sa Croix, composée en son épais­seur des pertes de biens, des humiliations, des mépris, des douleurs, des maladies et des peines spirituelles, qui doivent, par ma Providence, lui arriver chaque jour jusqu'à sa mort; sa Croix, composée en sa longueur d'une certaine durée de mois ou de jours qu'il doit être accablé de la calomnie, être étendu sur un lit, être ré­duit à l'aumône, et être en proie aux ten­tations, aux sécheresses, abandons et autres peines d'esprit; sa Croix, compo­sée en sa largeur de toutes les circons­tances les plus dures et les plus amères, soit de la part de ses amis, de ses domes­tiques, de ses parents; sa Croix enfin, composée en sa profondeur des peines les plus cachées dont je l'affligerai, sans qu'il puisse trouver de consolation dans les créatures, qui même, par mon ordre, lui tourneront le dos et s’uniront avec moi pour les faire souffrir.

La porter.

Qu'il la porte ! Et non pas qu'il la traîne, et non pas qu'il la secoue, et non pas qu'il la retranche, et non pas qu'il la cache ! C'est-à-dire: qu'il la porte haute à la main, sans impatience ni chagrin, sans plainte ni murmure volontaire, sans partage et ménagement naturel, sans honte et sans respect humain.

Qu'il la place sur son front, en disant avec saint Paul: A Dieu ne plaise que je prenne ma gloire en autre chose que la Croix de Jésus-Christ mon Maître!

Qu'il la porte sur ses épaules à l'exemple de Jésus-Christ, afin que cette croix lui devienne l'arme de ses conquêtes et le sceptre de son empire. Enfin, qu'il la mette dans son cœur par l'amour, pour la rendre un buisson ardent qui brûle jour et nuit du pur amour de Dieu sans se consumer!

Pourquoi la porter :

La croix, qu'il la porte, puisqu'il n'y a rien de si nécessaire, de si utile et de si doux, ni de si glorieux que de souffrir quelque chose pour Jésus-Christ.

Parce que pécheurs.

En effet, chers Amis de la Croix, vous êtes tous pécheurs; il n'y en a pas un parmi vous qui ne mérite l'enfer, et moi plus que personne. Il faut que nos péchés soient punis en ce monde ou dans l'autre; s'ils le sont en celui-ci, ils ne le seront pas dans l'autre.

Si Dieu les punit en celui-ci de concert avec nous, la punition sera amoureuse: ce sera la miséricorde, qui règne en ce monde, qui châtiera, et non la justice rigoureuse; le châtiment sera léger et passager, accompagné de douceurs et de mérites, suivi de récompenses dans le temps et l'éternité.

Mais si le châtiment nécessaire aux péchés que nous avons commis est réservé dans l'autre monde, ce sera la justice vengeresse de Dieu, qui met tout à feu et à sang, qui fera ce châtiment ! Châtiment épouvantable, ineffable, incompréhensible ? Châtiment sans miséricorde, sans pitié, sans soulagement, sans mérites, sans bornes et sans fin.

Oui, sans fin, ce péché mortel d'un moment que vous avez fait, cette pensée mauvaise et volontaire qui a échappé à votre connaissance, cette parole que le vent a emportée, cette petite action contre la loi de Dieu, qui a si peu duré, sera punie une éternité, tant que Dieu sera Dieu, avec les démons dans les enfers, sans que ce Dieu des vengeances ait pitié de vos effroyables tourments, de vos sanglots et de vos larmes capables de fendre les rochers !

A jamais souffrir, sans mérite, sans miséricorde et sans fin !

Y pensons-nous, mes chers Frères et Sœurs, quand nous souffrons quelque peine en ce monde? Que nous sommes donc heureux de faire un si heureux échange d'une peine éternelle et infructueuse en une passagère et méritoire, en portant cette croix avec patience!

Combien avons-nous de dettes non payées!

Combien avons-nous de péchés commis pour l'expiation desquels, même après une contrition amère et une confession sincère, il faudra que nous souffrions dans le purgatoire des siècles entiers, parce que nous nous sommes contentés en ce monde de quelques pénitences fort légères! Ah! Payons dans ce monde à l'amiable, en portant bien notre croix !

Tout est payé à la rigueur jusqu'au dernier denier, jusqu'à une parole oiseuse dans l'autre. Si nous pouvions seulement ravir au démon le livre de mort, où il a marqué tous nos péchés et la peine qui leur est due, que nous trouverions un grand débit du compte, et que nous serions ravis de souffrir des années entières ici-bas, plutôt que de souffrir une seule journée en l'autre !

Parce qu’amis et enfants de Dieu.

Ne vous flattez-vous pas, mes Amis de la Croix, d'être les amis de Dieu, ou de vouloir le devenir ? Résolvez-vous donc à boire le calice, qu'il faut boire nécessairement pour être fait ami de Dieu. Le bien-aimé Benjamin eut le calice, et ses autres frères n'eurent que le froment. Le grand favori de Jésus-Christ a eu son cœur, a monté au Calvaire et a bu au calice. Il est bon de désirer la gloire de Dieu; mais la désirer et la demander sans se résoudre à tout souffrir, c'est une folle et extravagante demande: il faut, c'est une nécessité, c'est une chose indispensable; il faut que nous entrions dans le royaume des cieux par beaucoup de tribulations et de croix.

Vous vous glorifiez avec raison d'être les enfants de Dieu. Glorifiez-vous donc des coups de fouet que ce bon Père vous a donnés et vous donnera dans la suite, car il fouette tous ses enfants.

Si vous n'êtes pas du nombre de ses fils bien-aimés, vous êtes, oh! Quel malheur ! Oh ! Quel coup de foudre ! Vous êtes, comme dit saint Augustin, du nombre des réprouvés. Celui qui ne gémit pas dans ce monde, comme un pèlerin et un étranger, ne se réjouira pas dans l'autre monde comme un citoyen du ciel, dit le même saint Augustin. Si Dieu le Père ne vous envoie pas de temps en temps quelques bonnes croix, c'est qu'il ne se soucie plus de vous, c'est qu'il est en colère contre vous; il ne vous regarde plus que comme un étranger hors de sa maison et de sa protection, ou comme un enfant bâtard qui ne méritant pas d'avoir sa portion dans l'héritage de son père, n'en mérite pas les soins et la correction.

A suivre

Extrait de : Lettre aux Amis de la Croix. L.M. de Montfort. Éditions Monfortaines. Montréal. (1957)

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